Giacometti, Beauvoir, Sartre : vertige de l’amitié !

Une exposition inédite qui présente l’amitié intellectuelle et artistique de ces trois figures majeures du XXe siècle. Elle interroge la quête d’un absolu dans l’art, dans la pensée, dans la vie.

Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir en Lituanie, 1965. Photo © Antanas Sudkus /Adago 2025 et Alberto Giacometti Homme qui chavire, 1950.

Beauvoir écrit au Dôme, son premier roman

Un homme au beau visage raboteux accompagné d’une très jolie femme

 Simone de Beauvoir est née carrefour Vavin, au-dessus de la Rotonde et face au Dôme. Elle rencontre à 21 ans Jean-Paul Sartre. On dit qu’il eut toute sa vie son rond de serviette à la Coupole tout à côté (table numéro 149). Photo © François Collombet
 Giacometti installé rue Hippolyte Maindron, dans le XIVème arrondissement de Paris. aime, comme les autres artistes, fréquenter les bars de la rue Vavin et la célèbre brasserie La Coupole, boulevard du Montparnasse. Photo © François Collombet

Lieu de l’atelier d’Alberto Giacometti, 46, rue Hippolyte Maindron. Pès de 70 ans séparent ces deux photos. On voit à gauche, Annette Giacometti, sa femme devant l’entrée du 46, rue Hippolyte-Maindron en 1956. Photo Isaku Yanaihara (archives Fondation Giacometti). A droite Photo © François Collombet

L’atelier d’Alberto Giacometti démonté rue Hippolyte-Maindron et remonté dans l’entrée de la Fondation Giacometti. Il réunit plus d’une soixantaine d’œuvres originales et remet en scène fidèlement l’ensemble du mobilier et les murs de l’atelier peints par Alberto Giacometti. Photo © François Collombet

Une profonde entente intellectuelle

Jean-Paul Sartre accoudé 1949. Alberto Giacometti Crayon graphique et gomme sur papier.
Alberto Giacometti : L’Objet invisible en bronze 1948 et Homme (Apollon), 1929 bronze 39,4 x 30,9 x 8,2 cm,. Ces 2 œuvres sont présentent en 1948, à l’exposition à la Galerie Pierre Matisse à New York. Au mouvement minimal, comme extirpé du néant, le public new yorkais qui connaissait Giacometti le surréaliste va découvrir son autre style décrit par Jean-Paul Sartre dans “La recherche de l’absolu “. Photo © François Collombet
Pages extraites de l’essai : La Recherche de l’absolu de Jean-Paul Sartre annotées par Giacometti. Essai paru en janvier 1948 simultanément à New York et à Paris. À New York, le texte de Sartre figure dans le catalogue de l’exposition organisée à la Pierre Matisse Gallery : Alberto Giacometti, Sculptures, À Paris, il est publié dans la revue Les Temps modernes, créée en 1945. Photo © François Collombet
Alberto Giacometti Nature morte avec cafetière sur la couverture de la revue Les Temps modernes n°209 (octobre 1963). stylo-bille bleu sur imprimé. Photo © François Collombet
Alberto Giacometti Grande Figure 1948-1949 Plâtre : 173 x 16,5 x 34,5 cm. Photo © François Collombet
Alberto Giacometti Tête sur tige, 1947. Plâtre peint 54 x 19 x 15. Photo © François Collombet

Au risque du vertige !

L’Homme qui chavire (1950) et La Main (1950), ces deux œuvres emblématiques de l’exposition

Alberto Giacometti Homme qui chavire, 1950. Bronze 60 x 22 x 36 cm. Photo © François Collombet
Alberto Giacometti La Main Bronze 57 x 72 x 3,50 cm. Photo © François Collombet
Alberto Giacometti est un habitué de la Brasserie Lipp, boulevard Saint-Germain. Au Printemps 1941, alors que Jean-Paul Sartre rentre du stalag où il était prisonnier, ils s’y retrouvent. A l’époque, Giacometti se déplace avec des béquilles après avoir été percuté par une voiture place des Pyramides. Une rencontre autour du désarroi et de l’anxiété nés de l’Occupation. Entre eux, la communication passe. Giacometti évoque ses sculptures miniatures en plâtre, qu’il cache ou détruit, sa quête d’une juste représentation d’un être humain tourmenté, l’importance du corps et du visage. Photo © François Collombet
Le Flore situé boulevard Saint-Germain, face à la Brasserie Lipp. Le Café Flore accueille aussi Jean-Paul Sartre qui y écrit son grand traité, L’Être et le Néant, au premier étage. Plus tard, après avoir vu les statues de Giacometti, Sartre célébrera ces silhouettes fragiles et torturées : « ces esquisses mouvantes, toujours à mi-chemin entre le néant et l’être » écrit-il dans : La recherche de l’absolu. Photo © François Collombet

Pour cette exposition, Agnès Geoffray a réalisé plusieurs séries d’images présentant des femmes comme en suspens ou en déséquilibre.

La photographe Agnès Geoffray et son œuvre : Femme oblique, 2025. Tirage pigmentaire. Photo © François Collombet

Quand l’Institut Giacometti reconstitue la «Chambre à soi» de Simone de Beauvoir

« Ma manière de vivre avait changé, je restais beaucoup chez moi. Ce mot s’était chargé d’un sens nouveau. Pendant longtemps, je n’avais rien possédé, ni mobilier, ni garde-robe. Maintenant il y avait dans ma penderie des vestes et des jupes guatémaltèques, des blouses mexicaines, un tailleur et des manteaux américains. Ma chambre était décorée d’objets sans valeur mais pour moi précieux.’ des œufs d’Autruches sahariens, des tams-tams en plomb, des tambours que Sartre m’avait rapportés de Haïti, des épées en verre et des miroirs vénitiens qu’il m’avait achetés rue Bonaparte, un moulage en plâtre de ses mains, les lampadaires de Giacometti. J’aimais travailler face à la fenêtre.’ le ciel bleu encadré par des rideaux rouges ressemblait à un décor de Bérard. » Simone de Beauvoir, La Force des choses

L’intérieur de Simone de Beauvoir recomposé pour l’exposition à l’Institut Giacometti. Il témoigne de son indifférence à toute hiérarchisation des œuvres d’art, et à son goût pour la disposition des objets dans l’espace, Cette pièce lumineuse est aussi une bibliothèque, et un bureau où écrire. Ainsi, dans son atelier reconstitué, le visiteur peut s’y assoir, lire et réfléchir comme dans une chambre d’écriture à soi. Photo © François Collombet
Simone de Beauvoir chez elle au 11 bis, rue Victor Schœlcher en 1976. Elle est entourée de sa collection d’objets dont des figurines japonaises, un plat anthropomorphe napolitain, des masques japonais, une marionnette sicilienne, des miroirs vénitiens, un lampadaire «Figure» d’Alberto Giacometti (1933-1934), des figurines en bronze du Burkina Faso, des maracas mexicaines.
Photographe Jacques Pavlovsky.

De sa fenêtre au 11 bis rue Victor Schœlcher, Simone de Beauvoir avait la même vue que celle du 1er étage de l’Institut Giacometti, sur le cimetière du Montparnasse. C’est dans cet appartement, deux matins par mois, qu’elle recevait le comité de rédaction des Temps modernes. Elle s’était installée dans cet atelier en 1955 grâce à l’argent du prix Goncourt. La première nuit qu’elle y passa, elle pensa : “voilà mon lit de mort”. Photo © François Collombet
L’Institut Giacometti à quelques mètres de l’immeuble où habitait Simone de Beauvoir est le lieu de la Fondation Giacometti consacré à l’exposition, la recherche en histoire de l’art et la pédagogie. Il est présidé par Catherine Grenier, directrice de la Fondation Giacometti depuis 2014. Accessible à tous les publics, iI présente de manière permanente l’atelier mythique d’Alberto Giacometti. Photo © François Collombet

L’arrivée d’Annette Arm à Paris. A la gare, il n’est pas là et “sa maison est à faire peur” (Simone de Beauvoir)

L’amie et l’épouse !

Buste de Simone de Beauvoir de profil. 1946. 13,5 x 9,2 cm.

28 août 1946

Alberto Giacometti Petit buste d’Annette. Plâtre peint 19 x 15,9 x 9,6 cm. Photo © François Collombet
Alberto Giacometti. Petit buste d’Annette, vers 1951. Plâtre 21,5 x 14,5 x 9,4 cm. Photo © François Collombet

(Extrait du catalogue de l’exposition : Beauvoir, Sartre, Giacometti. Vertiges de l’absolu)

*Nelson Algren, l’amant américain de Simone de Beauvoir.

Quelques documents autour de Jean-Paul et notamment ses lunettes cachant son œil amblyope. Manquerait il à ce philosophe existentialiste ayant consacré deux essais à l’œuvre de Giacometti La Recherche de l’absolu  et Les Peintures de Giacometti, publiés respectivement en 1948 et en 1954, sa célèbre pipe ! Photo © François Collombet
Alberto Giacometti. Simone de Beauvoir, 1946. Plâtre peint ayant appartenu à Simone de Beauvoir. 13,9 x 4 x 4,1 cm.
Caveau cimetière Montparnasse où reposent Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir. Lui est à quelques pas de son dernier domicile, 29 boulevard Edgar Quinet, elle, à l’autre extrémité du cimetière, 11 bis rue Victor Schœlcher. Quant à Alberto Giacometti, le troisième ami, il a quitté son atelier de la rue Hippolyte Maindron (XIVe arrondissement) pour mourir à l’hôpital cantonal de Coire, en Suisse, le 11 janvier 1966. Son corps fut transféré à Borgonovo, et inhumé près de la tombe de ses parents. Photo © François Collombet

Emilie Bouvard commissaire de l’exposition : y a-t-il un esthétique de l’existentialisme ?

Emilie Bouvard est commissaire de l’exposition et directrice des collections à l’Institut Giacometti. Elle a dirigé le catalogue qui fait l’écho de la conversation de plusieurs années entre Beauvoir, Sartre et Giacometti. On découvre également un dialogue entre Esther Demoulin, Kate Kirkpatrick, Géraldine Gourbe et Emilie Bouvard autour des questions de création et d’engagement. Photo © François Collombet
Jeune fille à la lecture profitant d’une encoignure de la bibliothèque de l’Institut Giacometti. Retrouver peut être l’atmosphère de l’atelier reconstitué de Simone de Beauvoir. Là aussi on peut s’y assoir, lire et réfléchir comme dans une chambre d’écriture à soi. Photo © François Collombet

Sources : catalogue Vertige de l’absolu d’Emilie Bouvard. Editions Fage. Fondation-Giacometti-Institut.


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